La santé mentale est encore entourée de nombreux mythes qui alimentent la stigmatisation et freinent l’accès aux soins. Pourtant, les troubles psychologiques sont fréquents et concernent tout le monde, directement ou indirectement. Dans cet article, nous allons déconstruire six idées reçues courantes à l’aide de données scientifiques.
Sommaire : Mythe 1 : La santé mentale est moins importante que la santé physique Mythe 2 : Les personnes ayant des troubles mentaux sont dangereuses Mythe 3 : La santé mentale ne concerne que les “malades” Mythe 4 : Les troubles mentaux sont dus à un manque de volonté Mythe 5 : Les traitements en santé mentale ne sont pas efficaces Mythe 6 : On ne peut rien faire pour améliorer sa santé mentale |
Mythe 1 : La santé mentale est moins importante que la santé physique
Réalité : Santé mentale et santé physique sont étroitement liées
La santé mentale influence directement la santé physique. Le stress chronique, par exemple, peut augmenter le risque de maladies cardiovasculaires, d’hypertension et de troubles gastro-intestinaux. De même, la dépression est un facteur de risque pour des maladies comme le diabète de type 2 et les troubles immunitaires.
Il est donc essentiel de considérer la santé mentale comme un pilier du bien-être global, au même titre que la santé physique. En cas de grippe, personne ne remettra en cause le fait d’aller voir un médecin généraliste et de prendre des antibiotiques ! Il en est de même pour des symptômes dépressifs durables.
Mythe 2 : Les personnes ayant des troubles mentaux sont dangereuses
Réalité : La majorité des personnes atteintes de troubles psychiques ne sont pas violentes
L’idée selon laquelle il existe un lien étroit entre maladie mentale et violence est souvent exagérée. Une étude publiée dans The Lancet Psychiatry révèle que les individus souffrant de troubles mentaux graves sont beaucoup plus susceptibles d’être victimes de violence que de l’infliger. En fait, les taux de violence observés chez ces personnes ne sont pas significativement plus élevés que dans la population générale, à l’exception des cas où l’abus de substances est présent. Une autre étude souligne que les principaux facteurs de risque de violence chez les personnes atteintes de schizophrénie incluent l’abus de drogues, les antécédents criminels et l’automutilation.
Mythe 3 : La santé mentale ne concerne que les “malades”
Réalité : Tout le monde peut rencontrer des difficultés psychologiques
Les troubles mentaux comme la dépression ou la schizophrénie ne sont pas les seuls à nécessiter une prise en charge. L’anxiété, le deuil, le trouble du stress post-traumatique ou l’épuisement professionnel sont des expériences universelles qui peuvent affecter la qualité de vie. Selon l’OMS (2022), une personne sur quatre sera confrontée à un trouble mental à un moment donné de sa vie, mais tout le monde peut éprouver des difficultés émotionnelles nécessitant du soutien.
Investir dans la prévention et la sensibilisation permet d’intervenir plus tôt et d’éviter des répercussions sur sa qualité de vie.
Mythe 4 : Les troubles mentaux sont dus à un manque de volonté
Réalité : Les troubles mentaux résultent de facteurs biologiques, psychologiques et environnementaux
L’idée que les troubles psychiques seraient une question de volonté est erronée. Des études montrent que des facteurs génétiques, des déséquilibres neurochimiques et des expériences de vie traumatiques jouent un rôle clé. Par exemple, la dépression est associée à des anomalies dans la régulation de la sérotonine et du cortisol, rendant la simple “pensée positive” inefficace comme traitement unique.
La prise en charge repose sur des approches scientifiques comme la psychothérapie et les traitements médicamenteux, et non sur la seule force mentale.
Mythe 5 : Les traitements en santé mentale ne sont pas efficaces
Réalité : De nombreuses thérapies ont prouvé leur efficacité
Certaines personnes pensent que les troubles mentaux sont incurables ou que les traitements sont inefficaces. Pourtant, des études démontrent que la psychothérapie, la médication et les changements de mode de vie peuvent significativement améliorer les symptômes. Par exemple, la thérapie cognitivo-comportementale (TCC) est reconnue comme une approche efficace contre l’anxiété et la dépression en complément ou remplacement de la médication.
L’important est de trouver une approche adaptée à chaque individu, ce qui peut nécessiter du temps et des ajustements. Certaines personnes souffrent en effet de troubles dits “résistants” à la médication où d’autres alternatives comme la stimulation magnétique transcrânienne ou la stimulation cérébrale profonde existent.
Mythe 6 : On ne peut rien faire pour améliorer sa santé mentale
Réalité : Il existe des stratégies efficaces pour prendre soin de son bien-être psychologique
Contrairement à l’idée que la santé mentale serait totalement hors de notre contrôle, de nombreuses études montrent que certains comportements peuvent l’améliorer. Par exemple, l’exercice physique est reconnu pour atténuer les symptômes de dépression et d’anxiété. De même, la méditation et la pleine conscience ont démontré leur efficacité pour réduire le stress et favoriser le bien-être. Selon une revue systématique récente, s’engager dans des activités sociales serait l’une des meilleures façons de se sentir heureux. À court terme, exprimer de la gratitude, même par écrit, a également des effets positifs. Bien qu’il existe un facteur génétique dans la santé mentale, celui-ci n’est pas décisif. Si certains troubles nécessitent un accompagnement professionnel, chacun peut mettre en place des stratégies simples pour préserver sa santé mentale au quotidien.
Sources :
- Butler, A. C., Chapman, J. E., Forman, E. M., & Beck, A. T. (2006). The empirical status of cognitive-behavioral therapy: a review of meta-analyses. Clinical psychology review, 26(1), 17–31. https://doi.org/10.1016/j.cpr.2005.07.003
- Caspi, A., Sugden, K., Moffitt, T. E., Taylor, A., Craig, I. W., Harrington, H., McClay, J., Mill, J., Martin, J., Braithwaite, A., & Poulton, R. (2003). Influence of life stress on depression: moderation by a polymorphism in the 5-HTT gene. Science (New York, N.Y.), 301(5631), 386–389. https://doi.org/10.1126/science.1083968
- Cohen, S., Janicki-Deverts, D., Doyle, W. J., Miller, G. E., Frank, E., Rabin, B. S., & Turner, R. B. (2012). Chronic stress, glucocorticoid receptor resistance, inflammation, and disease risk. Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, 109(16), 5995–5999. https://doi.org/10.1073/pnas.1118355109
- DeRubeis, R. J., Siegle, G. J., & Hollon, S. D. (2008). Cognitive therapy versus medication for depression: treatment outcomes and neural mechanisms. Nature reviews. Neuroscience, 9(10), 788–796. https://doi.org/10.1038/nrn2345
- Fazel, S., Gulati, G., Linsell, L., Geddes, J. R., & Grann, M. (2009). Schizophrenia and violence: systematic review and meta-analysis. PLoS medicine, 6(8), e1000120. https://doi.org/10.1371/journal.pmed.1000120
- Fazel, S., Wolf, A., Palm, C., & Lichtenstein, P. (2014). Violent crime, suicide, and premature mortality in patients with schizophrenia and related disorders: a 38-year total population study in Sweden. The Lancet Psychiatry, 1(1), 44–54. https://doi.org/10.1016/s2215-0366(14)70223-8
- Folk, D., & Dunn, E. (2023). A systematic review of the strength of evidence for the most commonly recommended happiness strategies in mainstream media. Nature human behaviour, 7(10), 1697–1707. https://doi.org/10.1038/s41562-023-01651-4
- Gatt, J. M., Burton, K. L., Schofield, P. R., Bryant, R. A., & Williams, L. M. (2014). The heritability of mental health and wellbeing defined using COMPAS-W, a new composite measure of wellbeing. Psychiatry research, 219(1), 204–213. https://doi.org/10.1016/j.psychres.2014.04.033
- Penninx, B. W., Milaneschi, Y., Lamers, F., & Vogelzangs, N. (2013). Understanding the somatic consequences of depression: biological mechanisms and the role of depression symptom profile. BMC medicine, 11, 129. https://doi.org/10.1186/1741-7015-11-129
- World Health Organization (OMS). (2022). World mental health report: Transforming mental health for all. https://www.who.int/publications/i/item/9789240049338