En plein milieu d’une séance, Sarah, une cliente souffrant de claustrophobie, commence à montrer des signes visibles de panique : sa respiration s’accélère, ses mains deviennent moites, et elle demande soudainement de sortir de la pièce. En tant que massothérapeute, vous vous retrouvez face à une situation qui nécessite non seulement une compréhension des phobies, mais aussi une capacité à adapter votre approche pour aider votre cliente à retrouver son calme. Les phobies, appartenant à l’univers des troubles anxieux, peuvent avoir un impact direct sur votre pratique.
Sommaire : Diagnostic et types de phobies Le cercle vicieux des phobies Traitements des phobies Accompagner un client souffrant de phobie Conclusion |
Diagnostic et types de phobies
C’est l’un des troubles de la santé mentale les plus répandus avec une prévalence de 7 à 12.5% et un âge d’apparition autour de 7 ans, elles se distinguent des simples peurs par plusieurs critères :
- Une peur marquée et disproportionnée envers un objet ou une situation.
- Une réaction de peur systématique face à l’objet ou à la situation.
- Une évitement actif ou une endurance de la situation avec une anxiété marquée.
- Un impact significatif sur la vie quotidienne (fonctionnement social, occupationnel, professionnel…).
- Une persistance des symptômes pendant au moins six mois.
- L’absence d’explication alternative par d’autres troubles mentaux.
On retrouve cinq grandes catégories de phobies spécifiques :
- Phobies liées aux animaux : peur des chiens, des araignées ou encore des serpents.
- Phobies de l’environnement naturel : peur des orages, des hauteurs ou des profondeurs aquatiques (thalassophobie).
- Phobies sang-injection-blessure : peur des piqûres, de voir du sang ou des interventions médicales.
- Phobies situationnelles : peur des espaces confinés (claustrophobie) ou des voyages en avion.
- Autres phobies : peurs diverses, telles que la peur de vomir (émétophobie) ou de la contamination (mysophobie).
Certaines phobies peuvent être d’origine traumatique, comme une morsure de chien, ou résulter d’une observation, par exemple si un parent manifeste une peur intense dans une situation donnée. Elles peuvent apparaître spontanément, et font référence à des peurs archaïques qui ont participé à notre survie en des temps anciens.
Le cercle vicieux des phobies
Les phobies s’inscrivent souvent dans un cercle vicieux qui renforce et perpétue la peur. Tout commence par un sentiment de danger, qu’il soit réel ou imaginé, face à une situation spécifique. Ce sentiment déclenche une émotion intense, généralement marquée par de l’anxiété ou de l’angoisse. Pour apaiser cette détresse, la personne adopte une stratégie d’évitement, qui, à court terme, réduit l’émotion désagréable. Ce soulagement immédiat consolide l’idée que l’évitement est la solution pour échapper à l’angoisse, renforçant ainsi ce comportement. Toutefois, en évitant systématiquement la situation, la personne ne développe pas les compétences nécessaires pour gérer son angoisse, ce qui rend chaque confrontation potentielle encore plus difficile. Ce mécanisme, auto-renforçant, alimente le cercle vicieux, qui revient toujours à son point de départ.
Traitements des phobies
La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) est actuellement la méthode de traitement la mieux validée pour les phobies. Elle vise à réduire ou éliminer les symptômes en exposant progressivement le patient à la source de son angoisse, tout en apprenant à gérer l’anxiété qu’elle provoque. Ce processus de désensibilisation repose sur une exposition graduelle, allant de l’imagination à une confrontation réelle, accompagnée de techniques de respiration et de relaxation. Ces outils aident l’organisme à réguler son état de stress et à revenir à un état de calme.
L’hypnothérapie gagne également en reconnaissance dans ce domaine. Bien que prometteuse, son efficacité nécessite encore davantage d’études pour être pleinement validée.
Le recours aux médicaments reste limité : dans le cas de phobies sociales, un traitement de fond peut parfois être envisagé et pour les autres phobies spécifiques, l’utilisation d’anxiolytiques ou d’antidépresseurs se fait de manière ponctuelle. Par exemple pour gérer une situation inévitable comme un vol en avion. Cependant, ces traitements ne s’attaquent pas à la cause profonde de la phobie et doivent rester une solution d’appoint utilisée avec parcimonie.
Accompagner un client souffrant de phobie
Le massothérapeute n’a pas pour mission de diagnostiquer ou de traiter directement les phobies, mais il peut jouer un rôle clé en offrant un environnement où le client se sent en sécurité et peut se détendre. Pour ce faire, il est essentiel de faire preuve d’écoute et d’empathie, en prenant le temps de comprendre les peurs spécifiques du client. Par exemple, une personne ayant une phobie des aiguilles pourrait appréhender toute sensation rappelant une piqûre.
L’aménagement de l’environnement joue également un rôle crucial. Une pièce accueillante, dotée de lumières tamisées et d’une musique apaisante, peut aider à réduire les sensations d’oppression ou d’inconfort. De plus, enseigner au client des exercices de respiration ou de relaxation peut s’avérer très utile pour l’aider à réguler ses émotions pendant la séance. Une cliente atteinte de mysophobie (peur des germes) pourrait être rassurée par des mesures strictes d’hygiène visibles, comme le port de gants ou l’utilisation de lingettes désinfectantes.
Enfin, il est important d’adopter une approche progressive et transparente. Expliquer chaque étape du processus permet de créer un climat de confiance et de diminuer l’anxiété liée à l’inconnu. Cette communication ouverte contribue à établir un cadre rassurant et respectueux des besoins du client.
Il est essentiel d’inciter le client à aborder la question avec son médecin traitant, son psychiatre ou son psychologue, surtout si la phobie a un impact significatif sur sa vie quotidienne, comme un isolement social.
Conclusion
En reconnaissant les phobies et en adaptant vos séances, vous contribuez non seulement à la détente de vos clients, mais aussi à leur bien-être mental global. Cette sensibilité renforce votre posture de praticien bienveillant et compétent, capable de s’adapter à divers besoins et sensibilités.
A retenir :
- Les phobies, troubles anxieux courants, se caractérisent par une peur intense et disproportionnée. Elles s’inscrivent souvent dans un cercle vicieux où l’évitement renforce l’angoisse à long terme.
- La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) est la méthode de traitement la plus efficace, combinant exposition graduelle et techniques de relaxation. Les médicaments ne sont utilisés qu’exceptionnellement, en tant que solution ponctuelle.
- Offrir un environnement sécurisant et apaisant, écouter avec empathie et proposer des techniques de relaxation sont essentiels pour accompagner les clients souffrant de phobies.
- Il est important de conseiller aux clients de consulter un professionnel de santé (médecin, psychologue ou psychiatre) si la phobie a un fort impact sur leur quotidien.
Sources :
- American Psychiatric Association (2022). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders : DSM-5-TR.
- Kaczkurkin, A. N., & Foa, E. B. (2015). Cognitive-behavioral therapy for anxiety disorders: an update on the empirical evidence. Dialogues in Clinical Neuroscience, 17(3), 337–346. https://doi.org/10.31887/dcns.2015.17.3/akaczkurkin
- Millard, E. (2022, January 12). DSM-5 Phobia Types, Diagnosis, and Treatment. MedCentral. https://www.medcentral.com/behavioral-mental/anxiety/assessment-diagnosis-adherence-phobia
- Wolf, T. G., Schläppi, S., Benz, C. I., & Campus, G. (2022). Efficacy of Hypnosis on Dental Anxiety and Phobia: A Systematic Review and Meta-Analysis. Brain Sciences, 12(5), 521. https://doi.org/10.3390/brainsci12050521